Origine et histoire de la Cathédrale Notre-Dame-de-l'Annonciation
La cathédrale primatiale Notre-Dame-de-l'Annonciation et Saint-Sigisbert de Nancy, située place Monseigneur-Ruch à Nancy (Meurthe-et-Moselle, Lorraine), est un édifice catholique souvent à tort qualifié de basilique mineure ; elle bénéficie toutefois depuis 1867 des indulgences liées aux basiliques majeures romaines. Classée au titre des monuments historiques depuis le 9 août 1906, elle a accueilli en 2024 plus de 187 600 visiteurs, ce qui en fait le monument le plus visité de Nancy après la place Stanislas. Au Moyen Âge, la Lorraine ne disposait pas de siège épiscopal et Nancy dépendait de l'évêché de Toul ; à partir de 1552, lorsque cet évêché passa sous tutelle française, les ducs de Lorraine cherchèrent à obtenir un siège à Nancy, aboutissant à l'élévation de l'église de la capitale au rang de primatiale en 1602. En attendant la construction de la primatiale, des églises provisoires furent établies d'abord sur le site de l'actuelle église Saint‑Sébastien, puis dans le quartier où se trouve aujourd'hui la cathédrale, entre la rue des Chanoines et la rue Montesquieu. La construction de l'édifice actuel commença en 1703 sous le règne du duc Léopold Ier de Lorraine et fut poursuivie sous le règne de Stanislas Leszczynski. Des projets de création d'un évêché lorrain rencontrèrent des oppositions politiques, et la première messe dans la nouvelle église fut célébrée le 1er novembre 1742. Après la mort de Stanislas et la réunion de la Lorraine à la France, le vaste diocèse de Toul fut démantelé pour former les diocèses de Toul, Nancy et Saint‑Dié, tous suffragants de l'archevêché de Trèves ; la primatiale devint alors cathédrale du diocèse de Nancy, dont l'évêque porte le titre de primat de Lorraine. La cathédrale reçut en 1867 du pape Pie IX le privilège des indulgences des Stations romaines, honneur rappelé par une grande plaque de marbre à l'entrée.
Les plans, dessinés en 1700 par Giovan Betto et inspirés de l'église Sant'Andrea della Valle à Rome, furent modifiés par Jules Hardouin‑Mansart et achevés à moindre coût par Germain Boffrand. Le plan intérieur adopte la croix latine : la nef, flanquée de deux collatéraux et de deux bas‑côtés comportant chacun trois chapelles, s'organise autour d'un transept surmonté d'une coupole et d'une abside semi‑circulaire. La nef comprend une demi‑travée abritant l'orgue, deux travées complètes, le transept, une travée menant aux sacristies et l'abside qui déborde légèrement sur la rue ; elle mesure 60 m de longueur pour un peu moins de 14 m de largeur. L'ensemble, d'ordre corinthien, présente un décor sobre limité aux colonnes ; des anges sculptés portent des attributs mariaux, le maître‑autel polychrome date de 1763 et les stalles, dessinées par Boffrand, portent notamment le chiffre du primat Charles‑Joseph de Lorraine. À la croisée du transept, la coupole est ornée d'une fresque intitulée « gloire céleste », peinte par le Nancéien Claude Jacquart entre 1723 et 1727. Deux chapelles latérales sont fermées par des grilles de Jean Lamour réalisées entre 1751 et 1755, les autres grilles datent de 1759 et sont l'œuvre de son élève François Jeanmaire. La façade, d'équilibre classique et dotée d'un frontispice, présente deux corps latéraux coiffés de tours carrées surmontées de pavillons octogonaux, dômes et lanternons que Victor Hugo surnomma les « poivrières Pompadour » ; l'écartement notable entre les tours s'explique par le projet initial d'un dôme. Parmi les éléments remarquables figurent un Christ en croix en bois peint autrefois attribué à Ligier Richier, le trésor abritant de nombreux objets liturgiques du Xe siècle appartenant à saint Gauzelin, et une plaque commémorative consacrée à Eugène Tisserant, natif de Nancy.
Quatre tableaux de Claude Charles classés au titre d'objets sont conservés dans la cathédrale — Les Pauvres servis par saint Sigisbert, Le Couronnement de saint Sigisbert, Le Christ chez Marthe et Marie et La Flagellation — ; on y trouve également une Crucifixion attribuée à Claude Deruet dans la chapelle Saint‑Joseph, plusieurs toiles de Jean Girardet et une Apothéose de saint Sigisbert due à Lejeune. Bien que dédiée à Notre‑Dame de l'Annonciation, la cathédrale abrite un culte particulier envers saint Sigisbert : ses reliques, profanées à la Révolution, furent remplacées sous l'Empire par une Vierge à l'Enfant (1669) de César Bagard ; une statue du roi‑saint orne la façade, une chapelle lui est dédiée et plusieurs tableaux du chœur retracent son couronnement, son service aux pauvres et son apothéose. Quelques reliques, notamment une côte, ont échappé à la destruction et sont aujourd'hui conservées dans un reliquaire en bois doré et couronné exposé dans une chapelle latérale.
Depuis le concordat de 1801, la cathédrale a accueilli plusieurs ordinations épiscopales, parmi lesquelles celles de Louis‑Auguste Delalle (18 novembre 1855), Henri Delalle (2 juin 1904), Charles Ruch (16 juillet 1913), Henri‑Jean Houbaut (14 février 1935), Louis de Bazelaire (8 décembre 1947), Jean‑François‑Marie Streiff (21 novembre 1966), Jacques Delaporte (9 octobre 1976) et Jean‑Paul Jaeger (2 juin 1991). Le grand orgue, construit par Nicolas Dupont entre 1756 et 1763, a été agrandi par Jean‑François Vautrin en 1814, reconstruit par Aristide Cavaillé‑Coll en 1861 puis transformé en 1965 par la manufacture Haerpfer‑Erman. Des travaux d'entretien importants ont été réalisés en 2012 par Laurent Plet et Bertrand Cattiaux, et de 2021 à 2024 l'instrument a fait l'objet d'une grande restauration visant à restituer l'état historique issu de l'intervention de Cavaillé‑Coll tout en intégrant des améliorations techniques ; la partie instrumentale de 4 200 tuyaux a été démontée, rénovée et rassemblée, et les buffets nettoyés et traités. Les titulaires sont Johann Vexo depuis 2009 et Guillaume Beaudoin depuis 2014. Les neuf cloches demeurant en place sont réparties entre les deux tours — cinq plus petites dans la tour est et quatre plus grosses dans la tour ouest — et reposent sur des beffrois en bois ; celui des six plus petites est daté de 1994 tandis que le beffroi des grosses cloches, probablement d'origine, a été raboté au niveau de la cloche 4 pour permettre l'installation de cette dernière et de la cloche 3, les cloches étant suspendues à trois mètres du sol. La cathédrale offre de multiples vues et éléments remarquables, parmi lesquels la façade de nuit, les tours avec lanternes, le maître‑autel et son retable du Sacré‑Cœur, le grand orgue, la coupole et ses fresques, la chapelle Saint‑Joseph et la croix de chapitre des chanoines de Nancy.